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mardi 3 mai 2011

Malaai ramailo laagyo ! (env. "je m'y plais beaucoup")

Namaste à toutes et à tous,

Je remets à jour routes-infinies pour vous permettre de mieux percevoir l'ambiance népalaise du moment. En ce qui me concerne, je trouve que les années se suivent et commencent à se ressembler peu à peu, tout comme la manière de vous dire bonjour, et je ne m'en plains pas, au contraire !

Malgré tout, la politique locale, les rues et leur effervescence quotidienne, l'architecture et les formes urbaines, la nourriture (open curry!) et ce mélange des genres permanent entre modernisme et tradition font de Kathmandu une ville particulièrement changeante. Les publicités pour les i-phones, l’alcool, les cigarettes, les gels douches (avec des népalaises particulièrement « blanchies » et avenantes) mais aussi pour les grosses berlines, semblent se démultiplier aux abords des axes routiers et autres carrefours stratégiques. Le nombre de véhicules augmente constamment, les motos en tête, ce qui paralyse un peu plus chaque jour le trafic routier de la capitale népalaise dont le réseau semble nettement insuffisant. Il est difficile de construire de nouveaux axes car Kathmandu se trouve dans une vallée et non dans une plaine, le terrain, globalement accidenté aux bordures de la ville, n’est pas vraiment propice au développement des routes... Ces difficultés de circulation ont fait exploser les taux de particules dans l’air ainsi que les ventes de masques pour s’en protéger qui vont avec.




La sérénité de Bouddha face au bouillonnement urbain


"mon quartier"



Petit "garage" des rickshaws walla !

Malgré tout, quand on regarde de plus haut (lorsque l’on opère un changement d’échelle géographique -pour les connaisseurs- ;) ), tout ceci n’a rien de vraiment surprenant finalement, Kathmandu, comme ses consœurs des "pays en développement", voit s’accumuler les méfaits d’une volonté mal maîtrisée de rattraper le modèle occidental synonyme de standing, de réussite et de modernité. Problème, le pays n’est pas suffisant pourvu en infrastructures modernes (recyclage, énergies renouvelables, transports en commun différents du bus népalais moyen qui date de 1964 qui a fait 128 fois le tour du Népal avant d’être réparé en Inde avec des pièces chinoises par des Bangladais…). Les problèmes qui en découlent sont donc très nombreux, insuffisance électrique, déforestation, pollution car pas de circuit de recyclage digne de ce nom, réseau d’évacuation des eaux quasi-inexistant etc… Cette tentation du modernisme, entraîne d'indéniables externalités négatives d'un point de vue environnemental et avec l’individualisme, l’un de ses corollaires, il ne fait qu’accentuer les inégalités sociales bien assez visibles au Népal et plus largement dans tout le sous-continent indien.



Bien des Népalais disent que le Népal était comme ça et qu’il le restera. Leur parler d’aide internationale les fait rire jaune puisque depuis plus de 50 ans, des milliards sont arrivés au Népal par les circuits de l'aide internationale mais le peuple n’en a que très rarement vu la couleur… Des Népalais qui sont lassés par leurs politiciens nationaux avides de pouvoir (d'ailleurs le mois de mai s'annonce chargé en manifestations apparemment), n’ayant jamais vraiment apporté de réponse concrète aux maux de la société mais seulement de beaux discours bien léchés. Certains ici disent que dans 100 ans Kathmandu sera toujours pareil, ce fatalisme latent peut se comprendre au vu de la situation politique instable et par la difficulté qu’à ce pays à s’émanciper -et c’est normal- de l’influence de ses deux voisins qui ne sont autres que l’Inde et la Chine (rien que ça!) soit à peu près 2,5 milliards d’habitants : un véritable étau. Ces deux géants essayent perpétuellement d’avoir le Népal comme allié, entre maoïstes chinois et progressistes indiens corrompus adeptes du copinage avec Washington. Comme qui dirait, pour expliquer simplement ces complexes enjeux géopolitiques liés à l'eau -entre autres- (enjeux autour du partage des eaux provenant des glaciers himalayens) : «y’a un match dans le match».


Kathmandu-Durbar Marg : Prise de conscience locale initiée majoritairement par la jeunesse népalaise.


Face à tout ça, comme le disent les Népalais, le Népal restera 1er dans au moins un domaine : celui de la montagne évidemment, sur 14 sommets de plus de 8000 mètres sur Terre, 8 sont au Népal, on compte une centaine de « 7000 » et plus d’un millier de « 6000 », sans parler du reste qui ne constitue qu’un vulgaire ensemble de collines quasi-insignifiantes selon les Népalais…qui dit mieux ? (« mieux »). Cette présence géologique bénit par les cultes hindous et bouddhistes, permet au Népal de foncer à vive allure dans l’industrie touristique aux effets économiques intéressants mais qui ont, d’un autre côté, amplifiés les impacts négatifs sur l’environnement et sur les aspects culturels et sociaux.

Ayant constaté la majorité de ces problèmes par le passé, j’ai trouvé intéressant de m’impliquer dans une ONG locale « KEEP » (Kathmandu Environmental and Education Project) qui prône un tourisme dit « durable » (dont je m’empresse d’estimer leur niveau de durabilité !!) dans le cadre de mon stage de Master 2. Une ONG qui a tout de même déjà coopéré avec le WWF, ce qui n'est pas gage d'une parfaite durabilité mais qui a au moins le mérite de renforcer la légitimité de ses actions et sa notoriété (voir ici).
Je travaille (7h/ jour) avec un membre permanent de l’ONG, Arjun, sur des maquettes de cours destinés aux porteurs. Il s’agit d’hommes, globalement peu estimés et non-habitués à la haute montagne pour la plupart. Beaucoup d’entre eux viennent du sud du pays et cherchent à avoir un revenu complémentaire à leur travail travail agricole afin d’améliorer le quotidien de leur famille. Lors de la saison de trekking, ils portent des dizaines de kilos de matériels, de vivres ou simplement des sacs de touristes sur leur dos, leurs conditions de travail sont particulièrement difficiles car ils sont, dans bien des cas, sous-équipés et mal informés. Ce n’est pas un hasard si des dizaines de porteurs disparaissent dans les contrées himalayennes chaque année... Il n'y pas de réelles mesures les concernant alors qu'ils participent grandement à la croissance économique du pays : sans eux comment feraient les touristes pour manger du riz le long des sentiers de trekking?

Une fois ces maquettes terminées, les cours seront dispensés par des spécialistes à une centaine de porteurs d’ici la fin du mois (30 et 31 mai) pour les sensibiliser aux risques encourus en montagne, à la fragilité environnementale de ces régions, les renseigner sur leurs droits mais aussi pour leur permettre de reconnaître le mal des montagnes et d'autres maladies tout comme leur apporter une connaissance basique des premiers secours.
Par la suite, je devrais faire de l’évaluation de projets d’écovolontariat et je vais donner des cours de français à des spécialistes du tourisme au Népal ainsi qu'à des guides de trek pour leur apporter du vocabulaire général dans un premier temps et spécifique à la préservation environnementale par la suite. Enfin, je vais essayer de trouver des partenaires français pour financer ces projets et tenter d’améliorer la communication globale de l’ONG.


mon "bureau"...



Pour conclure, Erhard Loretan est décédé le 29 avril dernier, pour info, il était le 3ème alpiniste à avoir vaincu les 14 "8000m" de la planète...

Entre tout ça, je fais de nombreuses rencontres, je découvre des endroits improbables dans Kathmandu et mon esprit s’évade vers le Gosaikund lake, le Kanchenjunga, le lac Rara et le camp de base de l’Everest.

Namaskaar

9 commentaires:

  1. Namaskaar, mon Grand,
    Je suis heureuse d'être la 1ère à laisser un commentaire sur ton blog réactivé !
    Tu nous plonges direct grâce à l'intro dans la vie népalaise.
    Très classe ton bureau !
    Très bien renseigné, tout ce qui concerne le but de ton séjour, ta mission au sein de l'ONG !
    Très chouettes les photos !
    Très triste cette info concernant l'apiniste passée à la trappe dans nos journaux tant est foisonnante l'actualité...
    Bises - Maman

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  2. Yes, toujours un grand plaisirs de lire tes lignes ! C'est qu'il y a du talent derrière l'énergumène que l'on connait ^^!
    La bise - Thibault.

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  3. Bravo! Continue à nous donner des news comme ça, c'est top.
    Bisous profite bien. Charlotte

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  4. aaaaaah enfin des nouvelles, et quelles nouvelles !
    C'est sympa de vous lire toi, qui nous manques et tes belles phrases, qui nous ont manqué !
    Encore, encore, encore ! on en redemande du coup !
    T'aurais pu avoir une chaise pire que celle-là, soit heureux !!!
    Des bisous Darling - Little Brother
    Ta soeur

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  5. Et un commentaire en même temps que ta soeur (ma femme) un !!!
    Vraiment très plaisant à lire, j'insiste sur le très (mais je suis pas le premier héhéhé), c'est vrai qu'il y a du talent là-dedans, je le disais encore à Dianoux ce matin.

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  6. Mon pilooZ, un grand bravo pour ton courage, ton implication, ta grandeur d'ame, ton aide et ton savoir...
    Encore merci pour ses photos, ses infos et pour se que tu degages!!!
    Faya-full power dans ton projet et que celui ci t'ouvre le coeur encore plus qu'il ne l'est deja.
    Traveller addicted, profites, vies, aimes...
    BeniChou
    RootsWorldTraveller

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  7. Pierro l'admin.5 mai 2011 à 05:04

    Au fait, merci à tous mais là je commence à avoir un sacré melon... héhé...
    PS : "le match dans le match", il est pour toi Fifi (le mari de ma soeur = mon beauf, je te le rappelle)!
    biz

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  8. T le meilleur baroudeur que je connaisse....take care et mange des choses moins ...épicées...

    Mathieu

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